Régulièrement, nous entendons parler de l’émergence d’un Web 3.0, une toute nouvelle version du web. Aussi qualifié de Web sémantique ou Web3, le Web 3.0 vise aujourd’hui à reconsidérer l’approche des différentes données présentes sur le web, notamment via le système de blockchain. S’agit-il d’un simple effet de mode ou d’une véritable nouvelle version du web ? Nous vous disons tout ce qu’il y a à savoir sur cette innovation du web.
D’où vient le Web 3.0 ?
À l’origine, le Web 3.0 est une évolution du World Wide Web imaginée par son fondateur, Tim Berners-Lee. Son objectif est de construire un web intelligent, dans lequel toutes les informations autrefois stockées deviennent entièrement comprises des machines. Cette extension du web vise ainsi à faciliter l’exploitation de données structurées, notamment via des normes et des standards ouverts.
En 2014, cette idée a été reprise par l’informaticien anglais Gavin Wood pour développer une nouvelle génération du web, nommée Web3. Ici, le World Wide Web se dote de plusieurs éléments tels que la décentralisation, la blockchain ou encore les cryptomonnaies.
Aujourd’hui, lorsque nous parlons de Web 3.0, nous pensons donc surtout au Web3, une nouvelle génération du web en plein développement.
Quelle différence entre Web 2.0 et Web 3.0 ?
Directe évolution du Web 1.0 ou web statique (HTML/CSS), le Web 2.0 marque le passage à un web dynamique. Ici, l’accent est mis sur les interactions entre les Internautes et les sites web, le tout via des bases de données relationnelles. Cela se traduit par l’apparition des technologies CMS, des réseaux sociaux ou encore des formulaires en ligne.
Avec le Web 3.0, l’objectif est de passer à l’étape supérieure pour proposer un web dit sémantique. Grâce à la puissance des algorithmes, l’idée est de bâtir une expérience personnalisée, ouverte et décentralisée du web.
Pourquoi le Web 3.0 ?
Selon les partisans du Web 3.0, le principal problème des plateformes en ligne actuelles est le contrôle exercé par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). Le but du Web 3.0 est de redonner des droits aux Internautes en les responsabilisant sur un web dit « décentralisé ». Cette évolution confère alors plusieurs avantages à ses utilisateurs.
Un pouvoir redonné à l’utilisateur
L’idée d’un web décentralisé revient systématiquement dès que le Web 3.0 est abordé. De nos jours, nous remarquons effectivement une centralisation du web autour de grandes puissances, comme les GAFAM . Ces entreprises collectent d’énormes quantités de données et de contenus personnels sans que les Internautes aient réellement la main dessus.
La décentralisation suppose de ne plus faire passer nos informations par le biais des GAFAM, mais de redonner aux utilisateurs le contrôle de leurs propres données. Celles-ci sont alors stockées sur leurs propres machines, et inaccessibles par les grandes entreprises sans autorisation préalable. Une expérience privée et respectueuse de nos données personnelles s’ouvre donc grâce au Web 3.0.
Une navigation améliorée
Grâce à la décentralisation des données, la navigation devient bien plus agréable avec le Web 3.0. En effet, cette évolution suppose de ne plus passer par quelques serveurs centraux. En outre, fini les ralentissements ! Avec le Web3, tous les utilisateurs peuvent directement se connecter aux autres, ce qui évite les surcharges de serveurs. Le trafic est fluidifié, pour une navigation plus rapide sur l’ensemble du web.
Aussi, à l’aide des technologies sémantiques, il est beaucoup plus simple de trouver l’information souhaitée. Les métadonnées, les contextes de recherche, tout cela est compris par le Web 3.0. Les Internautes bénéficient alors de résultats de recherche encore plus précis et pertinents.
Une sécurité renforcée
Avec l’utilisation de l’intelligence artificielle, de l’apprentissage automatique et des systèmes de sécurité blockchain, le Web 3.0 offre une bien meilleure protection des informations personnelles des Internautes.
Pour mieux comprendre le fonctionnement de la sécurité blockchain, revenons sur quelques éléments de définition. La blockchain est une technologie qui permet de stocker et transmettre de l’information de façon sécurisée. Elle prend la forme d’une sorte de base de données partagée, ce qui offre une grande transparence aux transactions effectuées. Elle est nécessaire à l’échange de cryptomonnaies, des monnaies virtuelles, indépendantes des banques et qui reposent sur la cryptographie.
Par exemple, aujourd’hui lorsque vous vous connectez à une application à l’aide de votre adresse e-mail et de votre mot de passe, lorsque vous aimez une vidéo ou posez une question à Siri, toute cette activité est suivie par de grandes entreprises technologiques comme Google et Facebook afin que les publicités qu’ils proposent vous soient ciblées.
Avec le Web3, vous êtes donc propriétaire de vos données. Vos données restent privées, quelle que soit la plateforme à laquelle vous vous connectez. Un réseau de données décentralisé comme le Web3 permet de vendre ou d’échanger des données sans en perdre la propriété. Il vous permet donc de vous connecter en toute sécurité à Internet et de choisir à qui et comment vos données sont stockées.
Le Web3, une technologie contestée
Malgré ses caractéristiques fort avantageuses pour les utilisateurs, le Web 3.0 tel qu’il se profile est largement contesté par de nombreux experts de la tech. Depuis peu, les débats font rage : le Web3 déchaîne véritablement la chronique dans le monde du numérique, et ce pour diverses raisons.
De nombreux défis à relever
Tout d’abord, le Web3 est confronté à de nombreux défis de taille. Si l’idée d’une décentralisation du web est louable, celle-ci est bien utopique voire dangereuse. En l’état actuel des choses, son utilisation peut accélérer le développement de comportements frauduleux, comme la cybercriminalité. En effet, certains cas d’escroquerie sont d’ores et déjà à déplorer sur les premières applications se servant du Web3.
Aussi, il ne faut pas oublier son lien avec les technologies blockchain et la cryptomonnaie. Ces dernières sont extrêmement controversées de toutes parts, ce qui ne facilite pas son développement auprès d’un large public.
Enfin, se servir du Web3 suppose un important changement dans notre façon d’appréhender le web. Un autre état d’esprit s’impose, ce à quoi nous ne sommes peut-être pas encore tous préparés.
Le Web3 non reconnu comme Web 3.0
Si les défenseurs du Web3 l’avancent comme le digne représentant du Web 3.0, plusieurs experts de la tech ne partagent pas cet avis. Y compris Tim Berners-Lee, l’inventeur du web. S’il partage l’idée de redonner aux utilisateurs le pouvoir sur leurs données, la façon dont l’exécute le Web3 ne convient pas à sa propre vision du Web 3.0. L’utilisation de la blockchain, notamment, est remise en cause.
Lors du Web Summit 2022, le “Père de l’Internet” a partagé son rejet du Web3, affirmant que “le Web3 n’est pas du tout le Web”. D’autres grands acteurs dans le monde, comme le cofondateur de Twitter Jack Dorsey, rejoignent cette critique. Ce dernier ajoute même qu’en fin de compte, le Web3 s’avère être une “entité centralisée avec un label différent”.
Le Web3 : une simple mode ?
Au vu de l’ensemble de ces critiques, nous pouvons nous questionner quant à l’avenir du Web3. S’agit-il réellement de la révolution attendue par un Web 3.0 ? Même si de nombreux investissements ont déjà été effectués pour aider son développement, l’avenir du Web3 est très incertain.
Avec tous ces débats, nous pouvons surtout nous interroger sur le rôle joué par la blockchain dans ce projet. Permet-elle seulement d’instaurer un web décentralisé ? Ou s’agit-il d’un nouveau moyen de promouvoir la cryptomonnaie et les NFT ? Autant de la part des experts que du grand public, la méfiance est très grande à l’égard de ces technologies. Toutefois, rien n’empêche un avenir où navigateurs et applications tournent autour du système de blockchain. Un avenir où, finalement, le Web3 connaît un véritable essor… mais cela ne semble pas encore près d’arriver.
Qu’est-ce que le Web des données, l’autre Web 3.0 ?
Quand on parle de Web 3.0, mais surtout de Web sémantique, il n’est pas rare de croiser le concept de Web des données. S’il a été pensé comme partie intégrante du Web sémantique, le Web de données ne semble pas forcément lié au Web3. Ici, URI (Uniform Resource Identifier) et HTTP sont des standards au cœur de la sémantisation du Web. Alors, de quoi s’agit-il exactement ?
Le Web des données est une initiative directe du W3C (World Wide Web Consortium). Celle-ci souhaite employer les différentes technologies du Web sémantique, tel qu’il a été imaginé par Tim Berners-Lee, pour faciliter l’accès à des ensembles de données structurées. En clair, l’idée est de pouvoir directement retrouver les informations que l’on souhaite sans avoir à en recréer, et ainsi d’éviter leur duplication.
Cela passe par une utilisation de standards connus comme HTTP ou les URI. Plutôt que de servir de simples repères pour les utilisateurs, ils aident les machines et applications à retrouver l’information, à la comprendre puis à la réutiliser. En passant par des standards précis, tout le processus est en effet bien plus simple pour elles !
Des initiatives telles que DBpedia s’inscrivent dans cette démarche. Cette base de données vise à proposer des données structurées et normalisées directement issues de Wikipédia. Grâce à elle, l’information est donc plus accessible et réutilisable, ce qui s’inscrit dans l’idée de partage et d’ouverture du Web sémantique.
D’ailleurs, nous pouvons déjà en voir une utilisation concrète dès la page des résultats Google avec son Knowledge Graph. Avez-vous déjà remarqué que pour certaines de vos recherches sur ordinateur, une description apparaît sur le côté droit de la page ? Une grande partie des informations inscrites sont en réalité issues de projets comme DBpedia, avant d’être mises dans la forme souhaitée.
En imaginant le Web 3.0, le projet du “Père de l’Internet” est de non seulement faire collaborer les Internautes entre eux, mais d’également permettre aux machines d’échanger entre elles. Avec le Web des données, un premier pas a pu être fait, mais de nombreux obstacles sont encore à surmonter pour ériger un véritable Web sémantique. En effet, malgré la grande richesse qu’il apporte, des questions de sécurité reviennent encore et toujours.
Aujourd’hui, Tim Berners-Lee semble se concentrer sur le développement de Solid. Ce projet consiste à développer une plateforme autour du Web des données, toujours dans l’objectif d’instaurer un web décentralisé à la confidentialité renforcée. En opposition au Web3, il s’agit pour le fondateur du web de sa véritable vision d’un Web 3.0.
Finalement, que penser du Web 3.0 ?
Vous l’aurez compris : le Web 3.0 est un concept encore très flou à appréhender. Autrefois essentiellement attribué au Web des données, nous en entendons désormais surtout parler via le Web3. Cependant, entre ses nombreuses controverses et les défis qu’il rencontre, le Web 3.0 peine à se développer pleinement.
Encore dans ses premiers balbutiements, il va encore falloir un certain temps avant de voir apparaître une véritable nouvelle génération du web. Affaire à suivre !